mardi 29 mars 2016

Quels sont les effets du pouvoir sur le comportement des managers ?


     

Lorsque les managers ont du pouvoir, ils ont tendance à adopter trois types de comportements ...

Il y a quelques années, des chercheurs de l’université de Berkeley ont demandé à des étudiants de réfléchir à la façon d’améliorer la vie sur le campus. Dans chaque groupe, deux étudiants étaient chargés de rédiger une note sur le sujet. Le troisième étudiant (choisi au hasard …) avait pour mission d’évaluer la note … et de fixer la rémunération des deux autres étudiants. En fait, les chercheurs n’étaient absolument pas intéressés par la façon d’améliorer la vie sur le campus de l’université de Berkeley. Leur objectif était de mieux comprendre les effets du pouvoir sur le comportement des gens.

Après une demi-heure, l’un d’entre eux apportait une assiette avec cinq cookies aux étudiants. Il observait alors ce qui se passait. Si personne n’osait prendre le cinquième (et dernier …) cookie, l’étudiant qui jouait le rôle du « chef » prenait systématiquement le quatrième cookie. Il avait également beaucoup plus tendance à manger avec la bouche ouverte et à laisser des miettes que les deux autres étudiants ! Des centaines d’études ont été menées sur les effets du pouvoir. Elles montrent toutes que :
  • plus on a de pouvoir, plus on cherche à assouvir ses désirs (en prenant par exemple un cookie de plus que les autres …) ;
  • plus on a de pouvoir, moins on accorde d’attention aux autres (en mangeant par exemple ses deux cookies comme un porc …) ;
  • plus on a de pouvoir, plus on pense que les règles qui s’appliquent aux autres ne s’appliquent pas à soi (en prenant par exemple un cookie de plus que les autres et en le mangeant comme un porc …)
L’étude dite « des cookies » peut sembler anodine … mais ses résultats font froid dans le dos. S’il suffit de donner un tout petit peu de pouvoir à quelqu’un pour qu’il se comporte de manière aussi « désinhibée », que se passera-t-il si on lui donne beaucoup de pouvoir ? Comme l’ancienne Présidente de l’INA, il facturera peut-être 40.000 euros de notes de taxis à son entreprise (en moins d’un an) … sans trouver cela anormal.

Source : Sutton, R. (2010), Good boss, bad boss, Business Plus.

mardi 15 mars 2016

De bons auditeurs peuvent faire de mauvais audits




Les informations comptables peuvent être interprétées de manière différente. De bons auditeurs peuvent alors être amenés à faire de mauvais audits ...

Il y a quelques années, Max Bazerman, George Loewenstein et Don Moore ont demandé à des étudiants d’évaluer la valeur d’une entreprise à partir de ses documents comptables. Les étudiants étaient répartis en quatre groupes :
  • les acheteurs potentiels
  • les vendeurs potentiels
  • les auditeurs des acheteurs potentiels
  • les auditeurs des vendeurs potentiels.
Comme on pouvait un peu s’y attendre, les étudiants qui jouaient le rôle des vendeurs ont considéré que la valeur de l’entreprise était plus élevée (de l’ordre de 30% …) que les étudiants qui jouaient le rôle des acheteurs. De manière plus surprenante, l’avis des étudiants qui jouaient le rôle des auditeurs était quasiment identique à celui de leurs clients : les étudiants qui jouaient le rôle des auditeurs des vendeurs pensaient que la valeur de l’entreprise était 30% plus élevée que les étudiants qui jouaient le rôle des auditeurs des acheteurs …

Les trois chercheurs ont alors poursuivi leurs investigations. Ils ont demandé à 139 auditeurs travaillant pour un grand cabinet d’évaluer les comptes d’une entreprise (fictive …) La moitié des auditeurs était censée avoir été mandatée par cette entreprise. L’autre moitié était censée travailler pour un organisme indépendant. Dans cette étude, la probabilité de que les auditeurs certifient les comptes étaient 30% plus élevée lorsqu’ils avaient été mandatés par l’entreprise que lorsqu’ils travaillaient pour un organisme indépendant !

Comment expliquer ce phénomène ? Contrairement à ce que l’on pourrait penser, les informations comptables sont souvent ambiguës. Elles peuvent donc faire l’objet d’interprétations différentes selon les auditeurs. Comme l’a bien formulé le PDG d’Arthur Andersen (lors du procès de son cabinet au début des années 2000 …) : « Beaucoup de gens pensent que l’audit est une science. Je viens d’une école qui pense que c’est beaucoup plus un art … » Surtout, la proximité des auditeurs avec leur clients peut biaiser leur jugement. Lorsque les auditeurs partent de l’hypothèse que les comptes d’une entreprise sont fiables, ils finissent généralement par trouver les informations qui permettent de la valider (et vice-versa …). C’est le fameux biais de confirmation. Les bons auditeurs peuvent donc faire de mauvais audits … sans qu’ils en soient totalement conscients !

Source : Bazerman, M., Loewenstein, G., & Moore, D. (2002), “Why good accountants do bad audits”, Harvard Business Review, November, 96-102.